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Château de Roquetaillade
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ne question vient cependant à l'esprit : pourquoi le cardinal de la Mothe avait-il abandonné
un château presque neuf pour en faire bâtir un autre ? Il y a à cela plusieurs explications.
Au début du 14ème siècle, les seigneurs recherchaient davantage le confort et
n'aimaient plus rester enfermés dans des tours sombres et étroites. Le cardinal voulait
certainement aussi suivre l'exemple de son oncle, le pape Clément V, dont le palais-forteresse
était tout à fait au goût du jour.
T
oute l'histoire architecturale de Roquetaillade est inséparable de celle des quatre familles
qui s'y sont succédé.
Au 12ème siècle, Roquetaillade appartenait aux seigneurs de la Mothe qui s'étaient
engagés dans le parti anglo-gascon, comme la plupart des autres seigneurs de la région.
Un de ses plus illustres représentants fut le cardinal de la Mothe, celui même qui fit construire
le Château Neuf en 1306.
U
ne des originalités de Roquetaillade, c'est que le château s'est presque toujours transmis par
les femmes. Ainsi en 1552, Catherine de la Mothe épouse Jean de Lansac et lui apporte le château
en dot. La famille Lansac fut à l'origine de la première restauration du château après les
guerres de religion qui dévastèrent le pays.
C'est encore une femme, Marie Henriette (1767 1852), fille du dernier marquis de Lansac, qui
hérita de Roquetaillade et en assura la continuité. En 1789, elle épousa François de Laborie,
lui apportant en dot les terres et le château. Mais peu après elle divorça de son mari parti en
immigration, pour sauvegarder les biens de la famille. Cette pratique du divorce était fréquente
à l'époque. En effet, les biens des émigrés étaient très souvent mis sous séquestre et même
vendus. Marie Henriette était par ailleurs un personnage hors du commun. En pleine Révolution,
alors que son père, le marquis de Lansac, et sa soeur aînée Geneviève étaient emprisonnés par
les révolutionnaires, elle faisait la grande vie entre Bordeaux et Bazas, offrant de somptueux
dîners et déclarant qu'elle n'avait jamais été aussi heureuse que sous la Terreur! Sous la
révolution, le château de Roquetaillade échappa de peu à un triste sort. Une anecdote rapporte
que le comité révolutionnaire de Bazas avait décrété sa démolition et envoyé une équipe
d'hommes à cet effet. M. de Lansac doubla leur paie à la condition qu'ils n'en fassent rien et
leur conseilla de venir plutôt boire "le bon vin de Roquetaillade". Grâce au "bon vin", les
révolutionnaires ne démolirent rien d'autre que le haut d'une tour, laquelle fut par la suite
restaurée par les Mauvesin. Les seuls autres dégâts furent causés par la foudre qui frappa
plusieurs fois le donjon, jusqu'au jour où le marquis de Mauvesin installa un paratonnerre.
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